Détails sur la réflexion (élections 2017)
Hier, j’ai publié un article sur mon choix pour ces élections, et les raisons qui m’ont poussé à le faire. J’ai reçu de nombreux commentaires ici et sur Twitter. Ils ont été dans l’ensemble très bienveillants (avec quelques exception un peu énervées, mais moins que je ne l’aurais imaginé), et certaines de nos discussions m’ont poussé à développer une présentation plus neutre de la manière dont je vois les causes et les enjeux de nos divisions. J’espère que vous apprécierez le texte, et je vous invite à continuer les conversations, ici et ailleurs !
Posons d’abord les bases du constat, pour parler ensuite des solutions qu’envisagent chacun.
D’abord donc, le constat.
On parle beaucoup de l’état catastrophique de notre pays ou du monde aujourd’hui, mais il me semble que, si les problèmes que nous avons sont bien réels (et parfois urgents), nous avons une visons souvent trop restreinte de la situation dans laquelle nous sommes.
En effet, en regardant les choses avec un peu de recul, disons sur 50 ans, il me parait assez clair que la globalisation et l’économie de marché ont eu des effets très positifs sur le monde (amis socialistes, ne partez pas, je vous jure qu’on va se retrouver au bout de l’article !). La pauvreté recule, l’alphabetisation progresse, la criminalité est en chute libre, les infrastructures se développent, nous avons un accès illimité à l’information (au sens large)… Bref, à l’échelle du monde, il est difficile de nier que les choses vont, en moyenne, beaucoup mieux. Et que ces avancées sont en grande parties dues aux avancées technologiques, et à la globalisation qui en résulte. Encore une fois, on trouvera ici et là des contre exemples, mais si on compare les situations d’aujourd’hui et de l’après-guerre, il sera difficile de considerer la seconde comme plus enviable.
Là où le bât blesse, c’est principalement dans le monde occidental, où la globalisation a clairement créé une fracture sociale : il y a ceux qui en ont profité et s’en sont globalement bien sorti (dont je fais partie, comme sans doute la plupart de ceux qui liront ces lignes), et ceux qui ont été victimes des changements qu’elle a induit. Car si l’enrichissement (dans le sens de “la sortie de la pauvreté”) a été manifeste dans le monde, il y a tout de même des individus ou des catégories socio-professionnelles dont la situation s’est dégradée chez nous pendant qu’elle s’améliorait ailleurs. Concrètement, un ouvrier français ou américain va moins bien qu’avant, et un ouvrier chinois ou indien va mieux. Alors certes, les conditions de vie dans les pays en voie de développement restent moins bonnes que celles que nous connaissons ici, mais la situation reste préoccupante quand on est a plus de mal à subvenir aux besoins de sa famille. Là où une révolution économique ou technologique provoquait il y a quelques décennies un transfert de richesses et de compétences à un niveau d’un pays (industrialisation, par exemple), il est aujourd’hui fuyant sur la planète entière. Et la pilule est d’autant plus difficile à avaler quand on constate, et je pense qu’il est là aussi difficile de ne pas le faire, que si certains profitent “normalement” des bienfaits de la globalisation (société de services, informatique, etc), d’autres en ont tiré, littéralement et métaphoriquement, des bénéfices bien plus importants. Il y a en occident un affinage de la classe moyenne, écartelée entre plus de pauvreté d’un coté et plus de richesse de l’autre, et cette situation est clairement un danger pour la paix sociale. Quel que soit le niveau de richesse statistique de l’ensemble, une classe moyenne importante est une composante essentielle d’une société apaisée, et il clair que nous allons dans la direction inverse. Le danger est donc bien réel.
Ceci dit, je rappelle, pour faire halte aux image catastrophistes que peuvent générer ce dernier constat, que pour pouvoir juger la situation sereinement et justement, nous devons tout de même prendre en compte les avancées de ces dernières décennies. Il faut être conscient de ce qui se passe depuis 10 ou 20 ans, mais aussi de là où nous étions il y a 50 ou 60 ans. On ne peut pas, je crois, faire un étant cohérent de la situation ou deviser de solution crédible sans prendre en compte ces deux sets de données (au minimum) dont je parle. Je pense sincèrement que jusqu’ici la plupart d’entre nous partagera ce constat (qui est d’ailleurs conforté par les données statistiques).
Ensuite, les solutions
C’est là que les avis diverges. Je crois qu’il y a en gros deux écoles :
D’une part ceux qui pensent que la situation, devenue intenable, nécessite un revirement complet et radical. Dans ce groupe, on peut trouver ensemble les extrêmes du paysage politique français, qui préconisent par exemple la sortie de l’Euro ou de l’UE, le passage à une VIème république, une politique protectionniste et plus en repli, etc.
D’autre part, ceux qui pensent que la situation, certes loin d’être idéale, n’est pourtant pas à ce point désespérée. le regard tourné peut-être un peu plus loin en arrière, ils veulent conserver les aspects bénéfiques du parcours et “corriger le tir” pour en résoudre les défauts.
Le premier groupe reproche au second de vouloir continuer dans une direction qui, depuis un certain temps déjà, a prouvé son inefficacité, et ne faire qu’empirer la situation. Et ils pensent que ce système a déjà eu sa chance, et que sans action immédiate une catastrophe est inévitable. Pour eux, voter pour le consensus c’est “continuer” à aller dans le mur.
Et le second groupe reproche au premier de jouer avec le feu et de vouloir faire imploser un système qui, globalement, reste tout de même plus efficace que tout ce que nous avons eu jusqu’ici. Ils pensent qu’il est possible (et nécessaire) de corriger les problèmes et d’affiner le système, et craignent les solutions plus radicales parce qu’ils ne sont pas convaincu que ce qui viendra après sera aussi “propre” qu’on nous le dit.
Je pense sincèrement que les deux raisonnements se défendent. J’ai mon avis (vous le savez, je fais plutôt partie du deuxième camp, même si je vois des choses intéressantes chez les tenants du premier), mais je ne peux pas me résoudre à jeter aux oubliettes celui de ceux qui pensent autrement. Je ne suis pas convaincu de ma solution au point de, comme je le disais dans mon premier article, traiter de traitre ou d’assassin ceux qui pensent autrement. Je fais juste mon choix, en mon âme et conscience, sur la direction qui a le plus de chance de résoudre nos problèmes. En regardant d’où nous venons, je crois qu’on peut corriger le tir.
D’autres pensent qu’il est trop tard… Et bien, nous ne sommes pas d’accord, certes. Mais nous vivons en société, et savoir vivre ensemble quand nous sommes en désaccord est la base de la civilisation. C’en est même une composante nécessaire ; comment imaginer des élection où tout le monde serait toujours du même avis ? Comment imaginer une vie où on insulte et on condamne systématiquement ceux qui pensent autrement ? Pourtant, c’est ce genre d’attitude que je constate quotidiennement depuis quelques mois, sur ma droite comme sur ma gauche. Et c’est cela qui m’a conduit à écrire mon article d’hier. Mais si nous prenons un peu de recul, et si nous regardons les choses avec un peu plus de calme, comme j’ai essayé de le faire ici, il me parait facile de constater que, certes nous ne sommes pas d’accord, et nous ne tomberons sans doute pas d’accord même après cette élection, mais nous pouvons par contre accepter nos différences et éviter de nous haïr chaque jour parce que l’un dit blanc et que l’autre dit noir. Nous voyons tous les problèmes (à des degrés divers peut-être), et nous voulons tous les résoudre. Tombons au moins d’accord sur ça, ça nous fera déjà un point de départ commun…
PS : Je suis volontairement resté imprécis sur les problèmes et les solutions ; je ne parle pas de banques ou d’écologie ou de PAC ou de mille autre choses dont il est intéressant de discuter, parce que je ne veux pas m’empêtrer dans des débats sans fin. Le but de cet article, vous l’aurez compris, est plus de voir ce que nous avons en commun et de comprendre ce qui nous oppose, pour pouvoir en parler plus sereinement. J’espère ainsi avoir mieux réussi à faire avancer un poil le schmilblick…